. Un défi majeur: recruter les meilleurs élèves et les meilleurs enseignants. Il ne peut y avoir de formation d’excellence sans sélectivitéLa Conférence des Grandes Ecoles (CGE) tient son congrès biennal les jeudi 9 et vendredi 10 octobre à Rabat. Cette association regroupe près de deux cents établissements dont la crème de la crème du réseau des grandes écoles françaises qui accueillent plusieurs centaines d’élèves marocains. Deux écoles marocaines, l’EHTP (Hassania) et l’INPT viennent d’y adhérer en tant que membres associés. Christian Margaria, président de la Conférence des Grandes Ecoles explique les raisons de l’attractivité de ces écoles auprès des entreprises. Mais il va falloir affronter des défis: la mobilité des étudiants et des enseignants, l’ouverture des programmes pédagogiques et le développement de la recherche.- L’Economiste: Pourquoi avoir choisi le Maroc pour la tenue de votre congrès? - Christian Margaria: La Conférence des Grandes Ecoles, qui regroupe plus de 200 grandes écoles françaises, organise tous les deux ans un congrès. Dans le cadre du dialogue euro-méditerranéen, elle a décidé cette année de tenir son congrès dans un pays du Maghreb. Son choix s’est porté sur le Maroc en raison des nombreux liens historiques de ce pays avec la France et de la présence de nombreux réseaux d’anciens élèves structurés et efficaces. Deux établissements marocains viennent par ailleurs d’être admis à la Conférence des Grandes Ecoles: l’Ecole Hassania des travaux publics à Casablanca et l’Institut national des postes et télécommunications à Rabat.- Quels sont les défis auxquels sont confrontées aujourd’hui les grandes écoles?- Globalement, les grandes écoles s’insèrent dans le contexte mondial des formations supérieures d’excellence. Cela entraîne l’obligation de mobilité de leurs étudiants et enseignants chercheurs, d’ouverture dans leurs programmes pédagogiques et une dimension recherche significative. Tout cela ne peut se faire qu’au travers de financements à la hauteur de leurs ambitions. Or, les institutions françaises sont dans une situation de sous-dotation et dans un facteur souvent de 1 à 10 par rapport aux grands acteurs mondiaux les plus reconnus. Les quatre composantes d’un possible financement sont: un financement direct de l’Etat, les droits de scolarité payés par les étudiants, des contrats industriels et de recherche et des fonds d’entreprises ou de particuliers. Les années qui viennent vont conduire à une modification significative des contributions de ces composantes. Pour les écoles de management notamment, le défi sera de recruter les meilleurs enseignants et de capter les meilleurs étudiants potentiels dans un contexte international.- Vous avez affirmé que l’Europe vous envie ce système pour l’employabilité de ses lauréats alors que ses détracteurs l’accusent d’élitisme. - Il n’existe pas de formation d’excellence sans effort et, donc, sans sélectivité. Les grandes écoles ont choisi de sélectionner à l’entrée et de mener la quasi-totalité de leurs élèves au diplôme et à la réussite professionnelle.D’autres systèmes accueillent un maximum d’étudiants qui, par abandon ou par sélection successive, se retrouvent être très peu diplômés au final. Observée de la fin du cursus, la sélectivité est en fait toujours présente.- On vous sent réservé à l’idée d’un rapprochement entre les grandes écoles et l’université. Est-ce une évolution impensable et pourquoi tant de méfiance?- Une des caractéristiques principales des grandes écoles est leur réactivité et leur capacité d’adaptation, notamment aux évolutions économiques, scientifiques et sociétales. Cela est permis grâce à leur dimension et leur mode de gouvernance. Par ailleurs, les formes de relations multiples avec l’entreprise contribuent à la fois à l’employabilité de leurs diplômés et au pragmatisme indispensable aux enseignements comme à la recherche. Des collaborations sont déjà mises en œuvre dans le cadre de relations bilatérales, de pôles de compétitivité ou encore de pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES). Une évolution n’est pas impensable mais, d’une part, la mise en œuvre de la LRU (loi relative aux libertés et responsabilités des universités) dans les universités n’en est qu’à ses débuts et, d’autre part, les grandes écoles ne veulent pas perdre ce qui fait actuellement leur performance et leur renommée sur le plan de la formation, de la recherche et de l’insertion professionnelle.- Concrètement, comment les «grandes écoles» aux ressources différentes déclinent-elles leur internationalisation?- Tout d’abord, il faut rétablir la réalité des chiffres. Suivant les statuts et les tutelles, les ressources annuelles par étudiant dans une grande école varient de 9.000 à 25.000 euros pour s’établir en moyenne à 13.500 euros tandis que la dotation par étudiant inscrit à l’université est voisine de 7.500 euros. En fait, le taux de présence réelle des étudiants inscrits à la fac, le nombre de ceux qui passent effectivement les examens finaux et, enfin, le taux de réussite conduisent à un coût par diplômé de l’université au niveau M2 (master) équivalent, voire supérieur, à celui des étudiants des grandes écoles.
DIRECTEUR général de Telecom & Management Sud Paris, Christian Margaria préside la Conférence des Grandes Ecoles (CGE) depuis juin 2003. Diplômé de Telecom Paris, il a rejoint Telecom & Management Sud Paris (ex- INT) en tant qu’enseignant chercheur en mathématiques. De 1995 à 2004, il a assuré la direction de Telecom INT et a occupé le poste de directeur adjoint de l’Institut. Au sein de l’association, qui regroupe les écoles d’ingénieurs et de commerce, il s’est attelé à trois chantiers principaux: la lutte contre la désaffection des jeunes en général, et plus spécifiquement celle des étudiantes, pour les filières scientifiques, l’ouverture sociale de l’enseignement supérieur français et l’harmonisation européenne de ce dernier. Il est également très engagé en faveur de la parité et de l’égalité des chances, dans le domaine de l’enseignement supérieur scientifique.Christian Margaria a reçu les insignes de chevalier de la Légion d’honneur en 2005 et de l’ordre de chevalier des Palmes académiques en 2002.Il a publié aux Éditions Ellipses, en collaboration avec F. Bayen, trois ouvrages autour des «Problèmes de mathématiques appliquées» et plusieurs publications sur ce même thème, aux Editions INT, destinées aux élèves-ingénieurs et à la formation des cadres de France Télécom.
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