UN 2e report du procès de la casse. Et où a pesé pour la seconde fois l’absence des avocats désignés par leurs barreaux respectifs dans le cadre de l’assistance judiciaire. Les audiences du 4 et du 11 juin tenues à la Cour d’appel de Casablanca ont tour à tour été touchées de plein fouet par le boycott décrété par l’Association des barreaux du Maroc.
Décision affligeante prise le 25 mai à Rabat. Et où les 17 barreaux du Royaume ont appelé leurs avocats à stopper toute collaboration dans des affaires où ils sont commis d’office. Manière de tenir la dragée haute au ministère de la Justice et des libertés à l’origine de la réforme relative à l’assistance judiciaire.
L’association que préside Hassan Ouahbi a décidé aussi que la décision de boycott sera revue après la tenue de son 28e congrès. Il a eu effectivement lieu du 6 au 8 juin à Saïdia. Fait marquant: divorce consommé entre le ministre de la Justice, Mustapha Ramid, et l’Association des barreaux du Maroc (voir encadré). La situation ne s’est donc pas arrangée: le boycott a été maintenu même après la tenue du congrès. D’où le report de l’audience du 11 juin. Les événements s’enchaînent. A peine publié au Bulletin officiel du 9 mai 2013 que le ministre s’est déjà engagé à le réformer. Que va-t-il changer? Sans donner de détails, le ministre de tutelle assure que le montant des honoraires et la procédure de paiement seront revus sur la base d’une concertation avec l’Association des barreaux du Maroc (Cf. L’Economiste du 11 juin 2013). Si cette concertation se fait sur le dos de la traçabilité et de la transparence des fonds publics, le gouvernement Benkirane aura perdu une grande bataille.
Et aura parallèlement fait marche arrière sur l’un des volets stratégiques de la réforme de la justice. Tout en assurant l’accès à la justice et le droit à un procès équitable, l’assistance judiciaire est une garantie pour les droits de la défense. D’où la gravité de la décision du boycott qui revient finalement à consacrer indirectement un déni de droit. Voilà finalement le grand tabou qui a émergé avec le procès de la casse. Et où le tribunal a symboliquement servi de ring pour un règlement de comptes.
Echec politique
LA Cour d’appel de Casablanca a reporté l’audience du 11 juin à cause notamment du boycott des avocats commis d’office. Le conflit entre le ministère de la Justice et l’Association des barreaux du Maroc (ABM) y est pour beaucoup. Accusation et contre-accusation fusent au sujet du décret de l’assistance judiciaire. Celui-ci fixe le montant des honoraires des avocats et la procédure de paiement. L’ABM argue avoir été prise de court par la publication du décret au Bulletin officiel du 9 mai 2013, tout en avançant n’avoir pas été associée à sa conception. Les ordres des avocats font valoir aussi une atteinte «à l’indépendance et au prestige de la profession». Ils revendiquent sans sourciller de garder la main sur la fixation des honoraires accordés aux avocats dans le cadre d’une assistance judiciaire (1.200, 1.500 et 2.000 DH) et soutiennent que la procédure de paiement fixée par le décret «porte atteinte à leur dignité». La vraie question est de savoir de quel droit les barreaux peuvent prétendre dispatcher à leur guise des honoraires que l’Etat paye in fine? Chaque loi de Finances fixe par ailleurs les fonds dédiés à l’assistance judiciaire. Il est légitime que le Trésor public se charge de verser les honoraires sur pièces justificatives. Si la future formule du décret rompt avec cette logique de transparence et de réédition des comptes, cela reviendrait à reconnaitre l’échec politique du gouvernement à préserver l’intérêt général. Intérêt qui n’est pas forcément prioritaire pour les avocats.
F. F.
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