
Fédérant une quarantaine d’ONG, Saïd Essoulami a publié en juin 2020 un guide d’information sur la Covid. Il sert à repérer les points où l’information circule mal, rendant hasardeuse la prise de décision. Ayant d’autres faits d’armes à son actif, il est considéré comme un spécialiste de la liberté de presse, de l’accès à l’information et de la protection des professions liées, Il a fondé l’antenne Moyen Orient Afrique du nord du CMF, Center of Medias Freedom, et ouvert un Bureau pour le Maroc. Il y a particulièrement été actif dans le démarrage de la politique d’accès à l’information (L’Economiste du 4 mai 2018), faisant la part des choses entre les extrêmes, afin d’arriver à des résultats concrets ou encore dans la législation sur les archives en 2010. Contact: 0619935746 - [email protected] (Ph. CMF)
Le 2 novembre, la communauté internationale a commémoré la journée internationale pour la protection des journalistes et la fin de l’impunité. Cette journée a été adoptée par l’Assemblée Générale des Nations Unies lors de sa 68e session, en 2013 par la Résolution A/RES/68/163, qui proclame le 2 novembre «Journée Internationale de la fin de l’impunité pour les crimes commis contre les journalistes». Cette résolution a été adoptée aussi par le Maroc. Elle exhorte les Etats membres à mettre en place des mesures précises afin de lutter contre la culture d’impunité.
Engagements oubliés
Le Centre for Media Freedom (CMF) regrette que le Maroc n’ait pas profité de cette opportunité pour mettre en œuvre un mécanisme national de protection des journalistes en conformité avec l’article 7 paragraphe 4 de la loi sur la presse et l’édition de 2016. En effet, la «Journée» de l’ONU engage les autorités publiques de chaque pays membre «… à mettre en place des garanties légales et institutionnelles aux fins de protéger les journalistes contre toute agression ou menace lors de l’exercice de leur profession.»
Cet article n’a jamais été activé, et à la place d’un mécanisme transparent et de gouvernance multipartite, le gouvernement déclare avoir installé une coordination interministérielle effective.
Coordination à refaire
Donc aucune procédure disciplinaire n’a été engagée contre les responsables des agressions des journalistes, ce qui encourage l’impunité que les autorités publiques ont maintes fois déclaré combattre dans les instances internationales des droits de l’homme.
Le CMF pense qu’il est urgent que la coordination interministérielle sur la protection des journalistes soit radicalement revue. Il propose que votre ministère s’inspire du Plan d’action des Nations unies sur la protection des journalistes et la question de l’impunité de 2016. Ce dernier a été adopté par plusieurs pays. Il propose une approche holistique qui prend en compte, entre autres:
- La révision de l’environnement juridique limitant la liberté d’expression des journalistes ;
- La sensibilisation des journalistes, des juges et les forces de sécurité, et le public en général.
Cette approche devrait inclure une protection à toute personne qui exerce l’activité du journalisme de façon régulière, et pas seulement aux détenteurs de la carte de presse. Cette approche devrait couvrir aussi les agressions et les menaces provoquées par des acteurs non-étatiques hors ligne comme en ligne.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre d’Etat, l’expression de mes sentiments les plus respectueux.
Les promesses du Maroc
Dans une communication sur la sécurité des journalistes au Maroc (2 février 2017), la mission permanente du Maroc à Genève auprès du Haut-commissariat aux Droits de l’Homme (à la demande ce dernier), énonce que le gouvernement marocain a pris les mesures suivantes:
- La désignation depuis le 28 avril 2014 de l’inspection générale du ministère de la communication pour recevoir à travers le site E-réclamation les plaintes déposées par des journalistes pour d’éventuelles agressions perpétrées lors de l’exercice de leur métier ;
- Le transfert automatique des réclamations aux autorités compétentes;
- L’instauration d’une commission interministérielle tripartite (Communication, Intérieur et Justice) pour un meilleur traitement des réclamations.
Le CMF regrette le fait que cette coordination interministérielle, depuis son installation, soit restée invisible. Elle n’a enquêté sur aucune plainte déposée par les journalistes, directement par eux/elles-mêmes ou à travers le SNMP.

Plus qu’un an sur le programme
LE Ministère d’Etat chargé des droits de l’homme et des relations avec le Parlement, s’est donné un plan d’action national, pour la période 2018-2021. Ce plan d’action concerne la démocratie et les droits de l’Homme. Dans un sous-axe, le n°3, le plan national traite de la «liberté d’expression, de l’information, de la presse et du droit à l’information». Il reste donc une année pour:
1. Conduire une évaluation transparente sur le cadre institutionnel interministériel existant, que la mission permanente du Maroc à Genève au Haut-commissariat aux droits de l’homme a déclaré son opérationnalité depuis le 28 avril 2014.
2. Initier une consultation élargie avec les journalistes, les éditeurs et la société civile, ainsi que les autorités publiques concernées par la question en vue de la préparation d’un plan d’action nationale de protection des journalistes conforme au plan de l’Unesco.
Saïd Essoulami,
Président du CMF.

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