Après un très long passage dans les méandres des deux chambres, le Conseil national des langues et de la culture marocaine (CNLCM) est devenu réalité. Le dahir portant sur la promulgation de la loi organique n° 04-16. Attendu depuis plus de 8 ans, le CNLCM a été institué par la Constitution de 2011.

Doté d’un pouvoir consultatif, il est chargé notamment de «la protection et du développement des langues arabe et amazighe et des diverses expressions culturelles marocaines, qui constituent un patrimoine authentique et une source d’inspiration contemporaine». Il regroupe l’ensemble des institutions concernées par ces domaines. L’institution sera chargée d’émettre des avis sur toutes les questions d’ordre linguistique.
Selon l’article 3 du projet de loi, le conseil peut «apporter un appui technique aux différentes institutions et instances concernées par la mise en oeuvre du projet de loi relatif à l’officialisation de l’amazighe». Elle peut être saisie par le Roi, le chef du gouvernement ou les présidents des deux chambres du Parlement.
La loi organique créant et organisant le conseil a été déposée au parlement en 2016, depuis, le texte a eu beaucoup de mal à franchir le cap de l’examen en commission avant d’être débattu en séance plénière, suscitant un véritable tour de force au sein même de la majorité.
L’objet du litige a particulièrement concerné l’article 17 de cette loi, sur la création d’une instance chargée de la promotion des langues étrangères. Instance jugée anticonstitutionnelle par le PJD qui s’appuie sur le quatrième paragraphe de l’article 5 de la constitution marocaine.
Le texte dispose que la mission prioritaire du conseil est «la protection et le développement des langues arabe et amazighe et des diverses expressions culturelles marocaines, qui constituent un patrimoine authentique et une source d’inspiration contemporaine».
Pour les membres du parti de la lampe, créer une instance au sein du conseil pour promouvoir les langues étrangères aurait été contraire à la mission première de cette institution. Une disposition que contredit le troisième paragraphe du même article, qui dispose que l’Etat veille «à l’apprentissage et la maîtrise des langues étrangères, les plus utilisées dans le monde, en tant qu’outils de communication, d’intégration et d’interaction avec la société du savoir, et d’ouverture sur les différentes cultures et sur les civilisations contemporaines».
L’argument a servi de base aux défenseurs de cette instance. Un bras de fer qui aura duré près de deux ans, avant que le PJD ne cède sur ce point, ainsi qu’annoncé dans le bulletin officiel qui précise que ladite loi organique «…vise également la promotion de la culture nationale, la préservation et la valorisation du patrimoine culturel national, la simplification de l’enseignement et la maîtrise des langues étrangères les plus répandues dans le monde».
Le CNLCM sera articulé autour d’une série d’instances. Il s’agit essentiellement de l’assemblée générale, du Conseil national et du bureau de coordination. Le Conseil est formé de 29 membres, dont 6 sont nommés par le Roi. Les autres membres sont issus de certaines instances relevant du Conseil comme l’Ircam et l’Académie Mohammed VI de la langue arabe. S’y ajoutent des représentants du CNDH, du Conseil supérieur de l’éducation, de l’Académie du Royaume et du Corcas.
Les administrations publiques, les universités, ainsi que les ONG et les sociétés actives dans le secteur de l’industrie culturelle seront aussi représentées au sein de ce Conseil. Les membres sont nommés pour un mandat de 5 ans, renouvelable une fois.
Quid de l’Ircam?

La naissance du Conseil national des langues sonne définitivement le glas pour l’Institut royal de la culture amazighe, ou du moins de son indépendance, tout autant que d’autres institutions telles que l’Académie Mohammed VI de la langue arabe ainsi que l’Institut d’études et de recherches pour l’arabisation. Concrètement, cet institut sera absorbé par le nouveau Conseil.
Ce texte prévoit sa restructuration, afin qu’il fasse partie des institutions relevant de cette entité, au même titre que l’Académie Mohammed VI de la langue arabe, en plus de nouvelles structures, qui seront créées en vertu de ce projet. C’est le cas notamment de celle prenant en charge le dossier du hassani et des dialectes, celle pour le développement de l’utilisation des langues étrangères et une autre pour la préservation du patrimoine culturel.
Le directeur de l’Ircam figure parmi les membres du prochain Conseil national. Le projet de loi, actuellement en examen, prévoit l’intégration des fonctionnaires de l’Ircam dans la nouvelle entité, «en préservant tous leurs droits et avantages».
Ce Conseil héritera également du patrimoine de l’Ircam, notamment les biens immeubles, les comptes bancaires, les archives, mais également les engagements et les contrats passés avec les tiers. Au niveau du fonctionnement, le futur Conseil national des langues sera tenu de répondre aux demandes d’avis, portant sur les textes législatifs et réglementaires dans un délai d’un mois.
A.Bo
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